ET POUR QUELQUES EXPOS DE PLUS… AVRIL MAI

(Ci dessus Marie Havel au Seaquarium du Grau du roi)

Dans la situation exceptionnelle que nous vivons, il importe de garder les pieds sur terre. Or, si l’on ne peut plus se déplacer physiquement, on peut voyager grâce aux mots et aux images. Voici un aperçu de ce que vous auriez pu voir, entre cette fin du mois de mars et les mois d’avril ou mai, et que peut-être dans le meilleur des cas vous serez amené à voir, au cas où la plupart des date sont différées… Nous vous offrons donc une visite virtuelle en quelque sorte… Ou un compte-rendu subjectif de que vous avez-vous-même eu le temps visiter, quand nous vivions dans l’insouciance, il y a quelque semaines, voire quelques jours à peine.

Et pour quelques expos de plus par BTN

Commençons par l’Espace d’art contemporain de Bédarieux (19, avenue Abbé Tarroux, 0467954827) qui expose une « Mosaïque » de trois artistes régionales réunies par la féminité, jusqu’au 13 juin : Aline Jansen qui intègre la photographie à la matière picturale afin de produire des tableaux qui ne sont plus tout à fait abstraits et pas franchement figuratifs. Les villes modernes en particulier, lui sont une source d’inspiration jamais épuisée, avec leur pléthore de lignes et de matériaux urbains, en lesquels elle introduit des traces de vie et d’humanité. La matière, généreuse dans sa production, leur attribue, de surcroît, cette chair qui achève de les transfigurer. Aline Jansen épuise toutes les nuances de l’ocre ou du brun, du gris également dans une déclinaison tonale qui ne laisse guère indifférent. Oddbjorg Reinton est d’origine scandinave. Cela fait pas mal de temps qu’elle a trouvé dans la cause animale son motif de prédilection. Plus précisément les espèces en voie de disparition, tels que les ours blancs, les grands gorilles, les éléphants, les tortues, certains poissons et bien sûr les mammifères marins. Elle y ajoute parfois du texte comme pour leur parler, leur demander pardon et apprécie tout particulièrement le collage ou l’assemblage de figures mises sur le même plan. En fait, elle célèbre en même temps la disparition de la peinture comme genre majeur non sans espérer la maintenir à flots. Certains de ses tableaux lorgnent vers le monochrome. Seule la figure émerge et revendique son droit à la survie. Chris Mattia vit à Sète mais vient du Québec. Elle est aussi à l’aise dans la photographie que dans le volume (barque ou cabane assortie de racines tissées), voire dans la peinture ou le dessin (loup frontal et renversé, tête-bêche, les deux animaux réunis par un napperon). C’est avec curiosité que l’on découvrira sa production anthropologique qui ne néglige pas des problèmes brûlants telle la gestion des déchets. A Lodève, en accord avec une auteure, elle se lance dans l’univers des contes et des loups mais humanisés. Ses installations animalières confinent au merveilleux qui s’appuie pourtant sur du concret dans des installations qui sollicitent du mobilier quotidien ou des capsules de café. Des hybridités comme ces branches de cerisier ou ce MP3 en lieu et place des bois d’un cerf. Un univers poétique, qui relève de l’enfance donc.

Le musée de Lodève (Square G. Auric, 0411950220) offre, jusqu’au 23 août,  plus de 500 m2 au photographe marcheur Eric Bourret, marseillais et arpenteur des hauts sommets du monde. Se réclamant du land art, l’artiste multiplie les points de vue originaux (pensons à ses vues plongeantes) et les manières d’opérer inattendues (sa pratique de feuilleté temporel par superpositions d’images sur le même négatif). De même, il n’hésite pas à présenter ses restitutions nomades en polyptyques ou séries de très grands formats ce qui a nécessairement un impact visuel sur notre corps, au-delà du visible. Pensons à son Berceau de l’Humanité, où il semble se plonger dans les premières terres brûlées en Afrique du sud selon un protocole temporel et rythmique bien établi. L’image est souvent volontairement trouble ainsi qu’on peut le constater dans sa série végétale de la Forêt Primitive car pour lui l’expérience du paysage arpenté est forcément subjective. Cézanne, Giono et Hamish Fulton semblent des compagnons de route de ce pèlerin de l’art qui se heurte parfois à des obstacles, ainsi que le prouve un travail sur le Salagou. Car Bourret ne s’est pas contenté de présenter des travaux anciens, au sol, ce qui n’est pas si courant, comme au mur. Il a joué le jeu de la découverte des lieux typiques du cru tels que les grands causses ou le lac du Salagou. En ces temps où aller le plus vite possible impose à nos organismes des cadences excessives et un stress permanent, la marche et son isolement proposent une autre qualité de vie. Un autre regard sur le monde, sur notre rapport à celui-ci, dont nous sommes la conscience.

Le L.A.C. de Sigean, dans l’Aude, a invité un peintre et plasticien que nous aimons bien, Joel Renard, encore un qui travaille du côté de Sète, jusqu’au 24 mai (1, rue de la Berre, 0468488362). Le peintre construit en général ses tableaux à partir des principes qui le constituent en général, à savoir épaisseur et liquidité, opacité et transparence, géométrie et gestualité, contrastes de couleurs, apparition de traces, relation d’une forme à une autre. Le résultat déstabilise car l’on demeure dans une certaine abstraction et dans des tonalités plutôt sombres et nordiques.    Le résultat, même composé et structuré, paraît insaisissable. L’artiste aime à jouer également sur la déconstruction du cadre et sur des formats standard  afin d’ironiser sur le détournement de la peinture à des fins représentatives par les peintres du dimanche.  Il cherche à ouvrir une brèche de le cadre et y fonder une iconicité d’un type nouveau où se dévoilent les propriétés du langage pictural. Joel Renard recourt aussi au papier, à partir de collages noir et blanc lequel va inspirer une forme, un peu comme un détournement du cadavre exquis. Côté plastique, Joel Renard élabore des sculptures faites de bric et de broc, d’objets à portée de main, domestiques, humbles (barquette alimentaire, oranges séchées, boîtes d’œufs, mais aussi contreplaqué, métal, bois, et surtout béton…), souvent se présentant comme de fragiles colonnes vertébrales à partir desquelles s’agglutinent ou se développent des formats divers qui font masse. Ses arrangements sont donc souvent surprenants et décomplexés. Au départ dites « de bureau », partant modestes, elles sont susceptibles d’évoluer, de se répandre. Elles fonctionnent selon les mêmes règles que les peintures, sur la base d’une composition évolutive d’éléments disparates mais qui finissent par trouver une unité.  On a alors une impression de fragilité qui laisse à penser que c’est la recherche d’un équilibre qui prime, d’autant que l’artiste évolue sans idées préconçues. Il s’agit pur lui d’inscrire un geste temporaire dans l’espace, comme dans le tableau. Ce geste est reconduit par le temps d’exposition…

La galerie Europ’art, 6, rue Marceau à Aigues-Mortes (0611429238), offre ses cimaises jusqu’au 10 mai, à Estelle Contamin. L’univers de cette artiste nîmoise d’origine normande est empreint d’une étrange douceur, que ce soit dans ses tableaux abstraits ou dans sa figuration intimiste et onirique. Le flou, les superpositions voire les coulures concourent à créer une atmosphère qui s’origine dans quelque photo de famille mais qui prend une autre résonance de leur inclusion sur la toile. L’enfant en est le maître incontesté et on se demande si l’artiste en cherche pas à retrouver un peu de la manière simple de considérer le réel qui caractérisait le premier âge de la vie, tout en sachant qu’un tel monde  nous échappe, en raison de notre rationalisme empirique. Les animaux, si proches de l’enfance, les insectes et même les végétaux font petit à petit leur apparition ouvrant de nouvelles coïncidences, d’inédites associations d’idées par le biais des images. Les couleurs sont tendres. Ce dont nous avons besoin quand les temps sont durs…

La même artiste Estelle Contamin, mais sans doute cette fois avec ses installations de voiles maculés de couleurs et comme sous perfusion, participe à un travail collectif avec le photographe Alex Allegri, le vidéaste Christophe Blanc (Valparess), le plasticien Tino di Santolo et la dramaturge Perrine Griselin : il s’agit d’une réflexion sur la façon dont on se voit et dont on voit les autres, autrement dit d’une expérience collective menée sur le thème du portrait et de l’autoportrait. Plusieurs lieux accueilleront ce Dialogue d’artistes : la Bibliothèque de Carré d’art du 19 au 30 mai (0466763570), l’atrium du Pont du Gard du 2 au 10 juin (0466375099), puis la Médiathèque d’Uzès du 23 au 30 juin (0460030203). Il s’agit d’une restitution originale de résidence qui vise à mettre temporairement sous l’éteignoir les ambitions individuelles pour les mettre au service d’un projet commun, avec tout ce que cela peut apporter d’enrichissement personnel mais aussi  de découvertes transdisciplinaires. Le mélange du texte, de l’image, des volumes et de la couleur autour d’un thème ancestral, puisqu’il remonte à Narcisse, devrait incarner cette Traversée mutuelle des genres et codes.

L’espace Louis Feuillade, de Lunel (48 bd Lafayette, 0467878419) accueille un sculpteur, pour une incitation aux « Périples », Mohamed Grine, spécialiste du bronze et de formes féminines tellement fines qu’on les dirait, à l’instar du paletot de Rimbaud, devenues idéales. Il partage ce joli lieu, voué jadis à d’autres fins religieuses, avec Nicole Rémy Guieysse dont la peinture vise à traquer la lumière tout en stratifiant la matière, à la recherche de nouvelles formes. Ici aussi on peut parler d’invitation au voyage et donc de périples dans de nouveaux mondes, minéraux ou aquatiques. Et de mémoire qui se construit au fil des pérégrinations.

Pendant ce temps, à Nîmes, du 16 mai au 18 juillet, La Vigie (32, rue Clérisseau, 0466217637) ouvre son espace un peu particulier et toute en étages à quatre jeunes artistes, deux hommes et deux femmes, choisis par le Cacn et un lieu de promotion et de résidences rennais et donc breton. Pour un élan passif des choses correspond à la personnalité contradictoire de Morgan Azaroff, capable dans ses performances et vidéos de se dédoubler en magicien des rues, conférencier ou interprète de sa mélancolie dans le but de susciter le malaise. Son rapport à la machine, aux énergies qui nous traversent le corps, aux projections de sa silhouette font de sa quête une postulation identitaire bien dans l’air d’un temps où l’angoisse et le stress sont monnaie quotidienne. Les installations de Lucie Férézou sont à la fois surprenantes par l’impression de variété qu’elles fomentent : celle des matériaux assez surprenants tels que le tulle à paillettes, la soie, la feuille d’or, les coquillages, la mousse, la soie mais aussi la poussière, la résine, le plâtre, le cuivre, le plexiglas ou la branche de saule – et par la diversité des modes de présentation qu’elle en extrait : au sol, accroché au mur, en suspension du plafond, érigé tel un totem, dessin dans l’espace… Et l’ensemble donne une impression de douceur infinie, comme un monde de rêverie fluide. L’univers de Léo Fourdrinier, est lui également fondé sur une exploration de l’hybridité Nature/activité humaine. Il imagine les assemblages les plus spectaculaires et les plus incongrus tel ce palmier qui pousse d’un fauteuil roulant ou ces deux chiens en plâtre servant de support à une pierre. Ou cette tête de biche visible dans un regard d’égout. En fait, il fait partie de ces artistes qui élaborent l’archéologie du présent à l’attention des Historiens du futur. On trouve de nombreuses références aux colonnes, objets ou fragments de statues antiques. Comme il revient sur Nîmes, il faut s’attendre à le voir sillonner la garrigue environnante à la recherche de pierres, qu’il associe à des casques ou à des compositions complexes, à moins qu’il ne choisisse la photographie ou la vidéo. Louise Mervelet paraît vouer un culte non dissimulé à Mike Kelley ou Paul Mac Carthy et à un certain cinéma actuel. Il semble qu’elle s’intéresse à tous les mouvements ou tendances qui relèvent de la transgression, de l’indéterminé ou du mauvais goût.

A Montpellier, Boîte noire (1, rue Carbonnerie, 0686582562) offre en général aux artistes l’occasion de jouer avec son espace particulier. Ainsi de Nina Roussière, néo-sétoise, dont c’est la préoccupation prioritaire : d’une part avec une installation à base de treillis colorés dont elle extrait des jeux de profondeur et de transparence ; de l’autre avec une très nippone proposition à partir de lés de papier sur lesquelles disposer des traces graphiques, épousant la voute du lieu. On retrouve ces préoccupations, de manière fine et élégante, sur la plupart de ses dessins sur photogramme, plus intimistes rehaussés de pastels ou d’encre, où le plan devient la base d’une expérimentation des effets illusoires de profondeur. On pense à des reproductions de l’espace cosmique, ainsi que le prouvent les polyptyques sur la constellation du dragon, sauf que l’on est ici sur le plan et dans les dimensions de l’imaginaire. La réflexion se fait métaphysique et les signes confinent à l’écriture. On peut s’y plonger jusqu’au 2 mai au moins.

Vasistas (27 av, Bouisson-Bertrand, 06754958) entame le printemps avec une expo contrastée puisque les peintures édéniques de Julien Audebert, réalisées à partir de photos d’aquariums,  sont confrontées à la poétique du quotidien telle que la conçoit Gael Bonnefon qui se sert du médium photographique. Le premier revisite les codes du paradis perdu préadamite, et l‘histoire picturale du genre, mais dans une intention plutôt ironique. On est dans une certaine intemporalité où l’homme n’a pas sa place. Le second saisit la douceur de la violence dans des clichés qui semblent pris sur le vif, comme par accident, dans l’intimité domestique ou dans l’environnement immédiat. Le mélange de deux ne manque pas de piquant.

Al/ma (5, rue du plan du palais, 0663271563)  revient à, une abstraction radicale avec les monochromes de Patrick Des Gachons, réalisés à partir d’un protocole centripète, strict et qui se développe à l’échelle d’une existence. Partant d’un carré bleu, méditerranéen, dans un carré blanc, l’artiste part du centre pour atteindre, on l’espère un jour, la périphérie. C’est donc un travail qui sort du formalisme géométrique pour poser des questions métaphysiques du rapport que nous entretenons avec le temps et sur la manière dont l’art parvient à le gérer.

L’agence A+ Architecture (220, rue Cap. Pontel, 0618111169), fait une nouvelle fois confiance à Pierre Bendine-Boucar pour nous concocter l’une de ces expositions dont il a le secret dans ces locaux qui méritent en effet bien un peu de couleur. Elle s’intitule Double Messieurs et sollicite quatre artistes. Il a donc choisi trois de ses comparses, lesquels font toujours confiance au tableau. Le nîmois Guillaume Moschini crée des tensions et des oppositions entre deux ou trois zones colorées dans une volonté de susciter un sentiment de déséquilibre. Soit on a affaire à des embryons de formes géométriques soit à des formes longilignes transversales et aiguës. Le jeu des formes et des couleurs est particulièrement suggestif (j’avoue que l’échancrure aiguë entre les formes me fait penser à la bouche d’un crocodile, nîmois, ce qui n’est évidemment qu’une projection de l’esprit). L’ensemble assure au tableau sa verticalité dans la mesure où l’on pense à un empilement. Si Moschni se veut avant tout abstrait, le sétois Adrien Frégosi (encore un !) ne peut se départir de référence très allusives à la réalité, soit qu’il s’en souvienne, soit qu’il la crée de facto grâce à son imagination picturale.  Le peintre ne lésine pas avec la variété des couleurs. Frédéric Bouffardeau semble se soucier avant tout de transparence et de symétries. Les formes sont souples, sensuelles et les couleurs rompues, adoucies. Enfin Pierre Bendne-Boucar, dans la continuité de ses motifs floraux, recourt au quadrillage de la toile par des croisements orthonormés de lignes ou parfois de surfaces plus larges. Ici encore la couleur est reine et irradie dans les locaux lumineux de l’agence.

Grâce au Frac et au lycée Jean Vilar, à Villeneuve lez Avignon (Gard), encore une sétoise, Elena Salah,  s’offre une restitution de résidence royale autour de la confrontation de l’art contemporain avec des grands sites patrimoniaux. En l’occurrence en trois lieux, la Chartreuse (58, rue République, 0490152432)  le Fort St André et le Musée Pierre de Luxembourg. Avant tout tourné vers la mémoire, le travail d’Elena Salah s’appuie sur des données archéologiques et sur l’expression moderne d’un vestige du passé. En témoignent ces pierres de céramique, fabriquées à partir de fragments photographiés un peu partout dans le monde. Comme on le voit l’image peut devenir sculpture et on touche là au cœur de la production de cette artiste. On pourra voir entre autres d’immenses défenses d’éléphants conjuguées à des molaires dans une sorte d’hybridité anthropo-animale. Ici il s’agit de s’intéresser à ce qui se rejette ou s’oublie. Dans les deux vidéos, produites pour l’occasion, Elena Salah déambule dans l’étrange et gigantesque architecture de béton qu’Alberto Burri a construite afin de donner une sorte de sarcophage moderne aux ruines de la ville de Gibellina, détruite par un séisme. La démarche est sacrée, à l’instar de son origine africaine. L’artiste y découvre des trouées vers l’ancienne ville, des raccords pas très ajustés là où sévit la restauration de l’œuvre abandonnée, les résurgences de la nature célébrant, comme le titre l’indique, la Résilience des lieux. En fait, Elena Salah, ne s’est pas contentée de la Sicile : tous les lieux de séisme, naturels ou humains, l’ont sollicitée qu’il s’agisse d’Hiroshima, dont elle restitue, sur un pan le seul vestige, ou Tchernobyl ou encore Fukushima. Qu’est-ce qu’il en reste sinon des témoignages, des images, et une volonté de leur apporter une résonance artistique ou esthétique. Les sarcophages restaurés peuvent ainsi se lire comme des sources de larmes ou les fontaines de l’espoir.

De l’autre côté de la frontière gardoise, Renaud Vincent démarre une nouvelle saison, en sa galerie du Bourdaric, Vallon pont d’arc (0468095872). On sait que ce lieu privilégie le livre d’artiste et la collaboration Peintre/Poète. C’est le breton Loïc Le Groumellec qui sera présenté en la galerie où l’on pourra voir ses séries de travaux d’écriture à partir du cairn de Gavrinis. C’est assez dire si cet artiste s’intéresse à l’archéologie de l’Armorique et aux anciennes civilisations qui l’ont habitée. Thierry le Saec, également poète, lui succèdera,  du 8 mai au 7 juin, illustrant cette fois François Cheng. Dans ses travaux récents le peintre, féru de recouvrement de surfaces, joue avec la frontière qui distingue l’abstraction d’un paysage subjectif ou de quelques traits végétaux.

A la Vrac de Millau, dans l’Aveyron, à savoir dans une vitrine urbaine, Suzy Lelièvre (cf. Al/ma) présente jusqu’au 3 mai, une structure en croisillons, à claire-voie, réalisée au laser et grisée qui sculpte littéralement dans l’espace des formes différentes de pièces (« rooms ») déclinant des variations géométriques empruntées à des principes mathématiques simples. Elle produit ainsi, devant des passants interpellés, des illusions d’optique et un jeu de formes qui interpelle notre paresse scopique usuelle.

Dernière minute : Le plasticien montpelliérain, d’origine catalane, Jordi nous signale l’installation d’une sphère en acier sur le rond point de l’Hôtel Coste à Palavas. Rappelons que chaque rond-point de l’avenue St Maurice, qui relie la célèbre station balnéaire à Carnon, est rythmée d’un de ces arbres, de couleur différente, toujours à partir d’une forme stylisée et répétitive, dont l’origine se perd dans la nuit de temps archéologiques…

Iconoscope (1 rue Général Maureilhan, 0620365747) nous annonce les Espaces chimériques de Thomas Dutter dont les aquarelles semblent interroger le rapport Nature/culture ou Chaos/organisation.

Enfin le Seaquarium du Grau du roi offre chaque année, sous la houlette de Sylvie Logeux, une exposition et la possibilité d’acquisition d’une œuvre à un(e) artiste résident(e).  Cette année il s’agit de l’incontournable Marie Havel dont nous avons pu apprécier l’installation d’un faux bunker et l’immense dessin à base de flocage au Frac dernièrement. Entre autres, car on l’a beaucoup vu, du Vigan à la Serre, et de la Mouche (Béziers) à Lunel… On connaît la virtuosité graphique de l’artiste qui devrait trouver, dans les fonds marins, de quoi alimenter sa fertile imagination, son goût pour les romans d’aventure du 19ème, et son intérêt pour les univers mouvants, en situation de précarité ou de déséquilibre. De plus, s’immerger en deçà de 20000 lieues sous les mers, c’est replonger en enfance, avec tout ce qu’elle comporte à la fois de ludique, de poétique et d’insouciance. Les souvenirs de Marie Havel, associés précisément à la notion de jeu, modélisme compris, se conjuguent avec les tragédies de l’Histoire du côté des chemins et des cotes picardes dont elle est originaire. On devrait voir au Grau du roi, comment une cote peut en révéler une autre, un peu comme un édifice qui a fait son temps cède sa place à de nouveaux qui eux-mêmes… Ainsi tout se meut, à l’instar de cet univers mouvant et merveilleux des fonds marins dont on trouve un équivalent en modèle réduit au Seaquarium… Les dessins de Marie Havel nous conduisent dans une autre dimension, un autre règne, que Bachelard associait au Rêve. Nous en avons bien besoin par les temps qui coulent (plutôt lentement dans les circonstances actuelles)..