Me voici revenu de tant de sains naufrages
A ma coque se livre l’avenir du vécu
Récifs sauvages compagnons disparus défis sans nombre
Ithaque en point de mire et pourtant repoussée
Et n’aborder le port que pour mourir d’un râle

Tout du moins mes flancs portent-ils maints stigmates
Ultimes combats où l’amer se mêle aux jouissances

Graves fleuves de rouille le long de nos plages sablées
Aux parcours qui serpentent les traces boréales des sombres flots
Gagnant le bleu des horizons surgis du fond des lames voilées
Nonobstant la ligne des monts divins qui dresse en surface ses trombes
En force fauves faveurs de ces couchants pressés par la sueur des luttes
Sous les écumes d’or la terre n’est qu’un leurre
Avec quelques perles de gravité glissant du front des visions de nuages
Essaimant une ivresse marine saluée par la saveur du cri des houles
Toutes ces lignes d’infortunes sur le tableau des ciels électriques
Rares sont ces signes rageurs creusés dans la patine du temps

Et c’est Triste destin que du voyage le terme
Comme si l’œil de l’aventure plane
Ouvert à l’appel des couleurs du rêve
N’eût ravivé cet essor
N’hésitant plus à m’offrir un autre tour
Un calme plat et suspendu
Et à peindre D’équerre

 

(Livre sorti aux éditions de Rivières avec une peinture de Didier Equer et une photographie de Puerta).