PAQUES NOUVELLES (BLAISE)

                                                                       SOL

Marchez passants A pas précipités Que vous soyez touristes Ou regagniez vos lofts

Marchez sans sommeil Marchez sur vos reflets allongés Marchez sur les anciennes pistes

Algonquines Marchez où il importe que tout marche

A moins que de vous arrêter au pied de l’Empire Dans les boutiques à diversion

A divertissement disait-on jadis Et à besoins sans substance A jamais

Inassouvis Mais vite revenez à la marche Et d’ailleurs l’avez-vous quittée

Si tout marche Se perpétuent les lois du marché Nul ne saurait y échapper

L’autre bord de l’avenue vous attend Pour peu que vous franchissiez

Ces bandes abstraites d’universel langage Alors Marchez vite et gare aux feux 

Ne pas s’attarder Fixer le sol Regarder devant soi De multiples dangers guettent

Qui s’attarde Ceux qui ne dorment jamais et toujours s’agitent La foule

Continue des taxis jaunes dans le cri strident des sirènes de pompiers

Les scintillants élans de longilignes buildings en puissance Qui vous invitent vers le haut

Faute de place du côté des petites choses dont les plus humbles se contentent

Qui ne possèdent guère l’orgueil démesuré des Tours de Babel en babil

                                                           LIMBES

Envolez-vous vers les limbes austères de verre et de vie Elevez-vous au fil des niveaux

Où des êtres besognent dans la lévitation sans miracle Blaise où que tu sois Tu diras

A Kostro que le Christ n’est plus l’as de l’aérospatiale Tout le monde vole en métropole

Là règnent les étincelles de la Fée Ainsi la Nuit pâlissent les étoiles Et le Jardin se fait

Electrique Où cueillir la Pomme d’or Une tache aveugle aux yeux des anciens héros

Dont l’ombre rassurante hante et protège les armatures d’acier

Car nous évoluons au pays des fantômes Certains n’osent se montrer mais les plus audacieux

Vous saluent bien bas Et déroulent la ville sous vos pieds Comme un tapis

De salissures séculaires, de vrombissements incessants et de reflets effilés

Les silhouettes aussi des voleurs de feu Nourris d’images Ils semblent toujours fuir

Chacun mène ainsi sa course à son terme Pas que dans les quartiers A travers les ondes 

Les circuits et les câbles Sur la terre entière qui vit au rythme de L’île aux collines

En attendant Si l’on n’y prend garde Sous le coup d’un rêve soudain On verra les couleurs

Jaillir de leur cocon de néon Des images sur les affiches Quitter leur prison

De clinquant Et la lumière s’émanciper Quel sacré chaos dans cette ville au carré

CIEL OU ENFER, QU’IMPORTE

Fuyez cette nouvelle York bientôt submergée La vague aux lueurs d’apocalypse Se déploiera

Riche de ce que l’homme y aura mis de matière terrestre Et aussi de l’air et de l’enfer

Fuyez donc toutes les forces électriques du monde Qui se seront donné le mot

Les pointes des Tours Buildings et autres Centers formeront des icebergs Vestiges

D’une civilisation perdue Qui peut prévoir quelle aurore se dessinera Et quelle couleur

Adoptera le Ciel vaincu d’alors D’azur De Cendre ou En demi-teinte Celle de l’Espoir

L’avenir est explosif au nombre d’or Glissez vous donc vers les éthers sauvés de la furie

Diluvienne Et prenez le temps de vous poser Et reposer de tant et tant de siècles

D’action de Rumeur ou de rage L’Homme a tant besoin de l’air pur de la paix des vagues

Le regard immortel Encore il nous cache sa part d’ombre De l’Espérance divine C’est tout

Ce qu’il demeure du Grand Effacement qui se profile A l’horizon des sacrées Ecritures

Emportez-le Sur la libre voyance reconstruire l’Esprit rayonnant de sagesse primitive

Au terme du livre ultime qui ponctuera l’Histoire Celle que l’on a connue La dernière

Inscription encor non intelligible Sans doute à l’envers Car d’un lieu de rêves au sol a jailli

Cette divine étincelle Recueillez Mais pas question de laisser au Ciel le mot de La fin

Texte paru aux Eds Nacsel, aux bons soins d’Aline Jansen, à propos de l’un de ces tableaux sur New York